Installée aux Sourches, château chargé d’histoire à Saint-Symphorien (Sarthe), l’antiquaire parisienne s’est formée à la culture des pivoines. Elle est à la tête d’un conservatoire de plus de 3 000 plants. Il est ouvert au public le temps de la floraison. Jusqu’à début juin.

À deux jours de l’ouverture de la saison, Bénédicte de Foucaud peste contre la pluie qui alourdi les corolles délicates de ses pivoines et risque d’introduire leur pire ennemi : le champignon botrytis.

Vêtue d’un long cache-poussière, elle arpente les massifs en tirant son panier d’osier. Sécateur à la main, elle traque fleurs fanées et branches mortes. Veillant, après chaque coupe, à le désinfecter soigneusement pour éviter de contaminer ses précieux plants. Elle en a plus de 3 000, répartis dans les douves sèches du vaste château de Sourches, à Saint-Symphorien, en pleine campagne sarthoise.

Conservatoire mondial

Cette antiquaire parisienne est à la tête du Conservatoire de la pivoine. « Conservatoire autoproclamé, sourit-elle. Mais je suis sûre que nulle part au monde il n’y a autant de pivoines ! » Et le monde entier, elle l’a parcouru pour en rapporter des plants, rencontrer des spécialistes…

Le couple de Foucaud a acquis le château en 2001. Par non-conformisme d’abord, Bénédicte a choisi de planter ses premières pivoines dans le parc. Elles n’ont pas fait long feu. Croquées par un chevreuil, piétinées par un sanglier. L’histoire aurait pu s’arrêter là.

Une terre enrichie par… les vaches

À l’époque, les vaches du voisin s’étaient installées dans les douves sèches du château. L’endroit lui a paru idéal : à l’abri du vent et des prédateurs, lapins et mulots exceptés Les vaches sont parties paître ailleurs, lui laissant « une bonne fumure » . Et la châtelaine a commencé sa collection. Au début, se souvient-elle, on me prenait « pour une folle ».

Arbustives, herbacées, et ltoh (le croisement des deux premières), les pivoines s’y épanouissent somptueusement dans une grande variété de couleurs, de feuillages, de tailles. Au pied de chacune sont inscrits son nom, celui de son créateur et l’année de sa plantation.

Un fleurissement d’avril à début juin

Les précoces sont plantées au soleil et les tardives à l’ombre. On peut ainsi espérer un fleurissement d’avril à début juin. « Mais l’an passé, on a dû fermer plus tôt à cause de la chaleur. Pour la première fois, on a même dû arroser : 800 arrosoirs ! On ne l’a fait qu’une fois », rigole-t-elle.

Difficile de croire que la maîtresse des lieux est une « autodidacte ». Elle manie les noms aux consonances mystérieuses de ses protégées avec aisance. Déroule les lettres de noblesse des hybrideurs français et américains. Décline les liens de parenté de sa « Princesse tibétaine » aux grosses fleurs, avec sa « mère » plantée un peu plus loin. Elle a même écrit quatre petits ouvrages sur les pivoines. « Il n’y a pas de fleurs plus extraordinaires. D’abord par sa fugacité. Une fois par an, elle fleurit durant 15 jours et c’est fini. »

Une nurserie de 1 000 plants

Chaque année, une centaine de nouvelles venues sont introduites et colonisent d’autres endroits du vaste parc du château. La jardinière a de la réserve : un millier de plants de pivoines en nurserie ! Prêts à remplacer celles qui ne se seraient pas épanouies. « Si elles font la gueule, on les change d’endroits en octobre. » Mais, on n’est jamais à l’abri d’une surprise. Ainsi ce jeudi, une corolle jaune se dresse vers le ciel. « Je l’ai plantée en 2013, c’est la première fois qu’elle fleurit ! » se réjouit Bénédicte. La culture de la pivoine est aussi une école de la patience.

Ouverture ce samedi 29 avril 2023 à 12 h. Fermeture (probable, en fonction du défleurissement) le 4 juin 2023. Ouvert tous les jours (y compris les jours fériés) de 12 h à 18 h, sauf le mercredi : 8 € par chèque ou espèces. Contact : tél. 06 07 44 52 71.

Les pivoines de Sourches reproduites en aquarelles

La visite se termine par un passage dans les sous-sols du château. Dans la boutique, une belle collection d’aquarelles représentant des pivoines des Sourches. C’est Bénédicte de Foucaud qui a sélectionné les aquarellistes. « De véritables artistes : la pivoine est la fleur la plus difficile à représenter ». Des plants de pivoines de chez Tricot sont à la vente et il est possible de faire une petite halte au salon de thé.

Sur le chemin, des reproductions de toiles célèbres sont accrochées aux murs. Le château de Sourches a en effet abrité, pendant l’Occupation, 400 toiles de très grand format des musées parisiens : Le Radeau de la Méduse de Géricault, La Liberté guidant le peuple de Delacroix ou encore Les noces de Cana de Véronèse. Les sous-sols aux hauts plafonds (plus de 5 mètres de haut) ont constitué un abri sûr pendant la guerre. Il a fallu néanmoins démolir le mur d’entrée pour les y faire pénétrer.

Mme de Verneville

C’est le nom de la pivoine que Bénédicte de Foucaud recommande aux néophytes. « Elle est splendide et très facile à réussir. » Tout comme la dénommée « Hélène Martin ».

https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/sarthe/au-chateau-de-sourches-dans-la-sarthe-benedicte-de-foucaud-la-femme-aux-3-000-pivoines-8c163ce4-e512-11ed-996f-20d54156ce51